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PRINTS

Galerie Paul Prouté

Spectator not corrected by the sight of the guillotine

Victor HUGO

1802 – 1885

Spectator not corrected by the sight of the guillotine

1870
Pen and brown ink
127 × 71 mm
Annotated in pen and brown ink Spectateur point // corrigé par la vue // de la guillotine [ Spectator not// corrected by the view // of the guillotine], signed in pen and brown ink and brown ink lower right Victor Hugo, dated in black pencil lower left 1870
Provenance: Philippe Burty

Depuis Hauteville House, Victor Hugo adressa ce dessin au critique d’art Philippe Burty au début de l’année 1870. Dans une lettre désormais perdue mais que Burty reproduisit quelques années
plus tard dans un essai consacré aux dessins de l’écrivain, Hugo expliquait que la feuille était sa « protestation contre l’exécution de Troppmann ».
Jean-Baptiste Troppmann, coupable de l’assassinat des huit membres d’une même famille, fut guillotiné le 19 janvier 1870. Dans un texte admirable, Tourgueniev a décrit pour la postérité le
comportement brutal des dizaines de milliers de personnes rassemblées devant la prison de la Roquette pour assister à la décollation. Déjà l’écrivain russe insistait sur le peu d’édification morale des spectateurs qui ressortit de l’exécution – Hugo devait faire le même constat dans notre feuille.
En effet, si l’écrivain, alors en exil à Guernesey, n’assista pas à l’événement, la couverture médiatique sans précédent de l’affaire du « meurtrier de Pantin » lui permit d’être bien informé de l’enquête, du procès et de l’application de la peine. Fervent partisan de l’abolition de la peine de mort, et le militant infatigable que l’on sait, Hugo se saisit du cas : « L’affreux crime de Troppmann, loin d’être un obstacle est une occasion, il met à l’ordre du jour l’abolition de l’échafaud. Plus le crime est grand, plus le principe est éclatant ; l’assassinat prouve par
son horreur l’inviolabilité de la vie humaine, et il la prouve pour l’assassin comme pour la victime. […] Je déclare qu’il y a opportunité à réclamer, en présence de cet épouvantable Troppmann, la suppression de l’échafaud. D’ailleurs il est toujours l’heure de dire aux hommes : ne tuez pas »
Ce dessin, que l’écrivain jugeait lui-même « assez réussi », s’inscrit dans l’important renouvellement que connut la production graphique hugolienne vers 1870 : c’est alors que fut reprise l’activité de caricaturiste abandonnée depuis les années 18304. On rapprochera cette feuille d’un dessin, de technique et de format comparables, qui représente, rapidement croquée, la tête d’un spectateur « regardant guillotiner ». Les deux oeuvres prennent ainsi place entre le Théâtre de la Gaîté, satire des excès de la vie parisienne datée de 1869, et le Poëme de la Sorcière, série dédiée en 1872-1873 au procès, à la torture et à l’exécution, sur le bûcher et devant une foule en liesse, d’une jeune possédée.

Nous remercions Pierre Georgel, qui inclura cette feuille dans le catalogue raisonné des dessins de Victor Hugo.

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