Galerie Paul Prouté

Né à Valognes en 1847, Félix Buhot quitte sa Normandie natale pour poursuivre son désir de carrière artistique à Paris. Se rêvant plutôt peintre que graveur, il rentre à l’Ecole des Beaux-Arts en 1866 et fréquente les ateliers d’Isidore Pils et de Jules Noël. Doté d’une grande imagination, Félix Buhot laisse derrière lui un corpus varié de dessins, peintures, quelques rares peintures sur faïence, des éventails, et près de deux cents estampes.

Il découvre l’eau-forte vers 1873 et réalise ses premiers essais à partir de dessins plus anciens. A l’instar de Degas avant lui, Buhot graveur « cuisine ». Dans ses planches, qu’il appelle « tableaux sur cuivre », l’artiste allie les techniques traditionnelles de gravure, l’eau-forte, l’aquatinte et la pointe-sèche, à des effets d’encre dont il a le secret. Laissant parfois volontairement un surplus d’encre sur la plaque, Buhot vient créer au pinceau des trouées lumineuses, donnant à l’épreuve un caractère fantastique sinon étonnant. Il allie à ces techniques un intérêt marqué pour le papier qu’il choisit minutieusement, et qu’il trempe à certaines occasions dans du thé, de la térébenthine ou même de l’essence avant l’impression. Buhot développe par ailleurs autour de ses sujets un décor gravé permettant un complément narratif à la scène principale. Plus élaborées que de simples remarques, ces « marges symphoniques » sont une originalité de l’artiste. Il apprécie également marquer ses estampes de son fameux cachet rouge orné d’un hibou (búho en espagnol). Ces singularités et expérimentations traduisent sa recherche de la « belle épreuve », le plaçant au rang des meilleurs aquafortistes de sa génération.

De ses voyages entre la Normandie et Paris, l’artiste nous propose des gravures aux sujets parfois pittoresques ou lugubres, mais souvent teintés d’humour. Entre Pigalle et la Butte aux Cailles, c’est le Paris fin de siècle qui s’offre à nous, fourmillant d’animation et en pleine expansion urbaine. Quelques eaux-fortes et de rares lithographies de l’artiste nous renseignent sur ses voyages en Angleterre, où il rencontre son épouse Henrietta Johnston.

Actif au sein de la vie artistique parisienne, Félix Buhot contribue à l’illustration de nombreux ouvrages et revues. Il participe régulièrement au Salon, espérant être reconnu en tant que peintre, mais c’est bien son œuvre gravé qui rencontre le succès, et il obtient en 1880 une médaille d’or pour ses illustrations de Barbey d’Aurevilly. Le public américain est particulièrement conquis, et une exposition lui est consacrée dès 1888 à New York. Ardent défenseur de la gravure, il devient un membre fondateur de la Société des peintres-graveurs en 1889, aux côtés de Guérard, Goeneutte, Pissarro et Bracquemond.

Entre romantisme et impressionnisme, l’artiste participe activement au renouveau de l’eau-forte dans la seconde moitié du XIXe siècle.